Petit Pierre
Petit Pierre avait un esprit simple, il avait la faculté de s’émerveiller devant un rien, tout était source de joie.
Depuis qu’un jeudi, au catéchisme, on lui avait appris que l’homme était libre de choisir entre le bien et le mal, son enthousiasme pour la vie était encore plus fort, car, selon lui, il était aisé de suivre la bonne route.
Dans son esprit il était clair que mal agir était plus difficile que le contraire et il ne doutait plus de ne jamais faire le mauvais choix.
Même si petit Pierre aimait la chaleur rassurante du soleil, il lui préférait peut être encore la pluie, parce que l’abri d’une simple toile lui apparaissait comme un refuge un peu magique, ou l’on devait se serrer l’un contre l‘autre, et rien n’est plus beau que de se presser contre sa mère pour échapper aux gouttes de pluie.
Petit Pierre grandit avec une certaine candeur et parvint à traverser l’enfance en préservant son innocence.
Petit pierre avait toujours pensé rencontrer, un jour, petite Jeanne.
Il lui ferait des enfants, travaillerait pour rendre sa famille heureuse, lui offrirait tout le bien être possible et puis le devoir accompli, il s’endormirait paisiblement quittant les bras de sa famille pour ceux du père éternel.
Décidément rien n’était difficile, il suffisait de faire de son mieux, de sourire dans les moments un peu plus gris, de se monter droit et courageux, d’être, en un mot, un homme bien pour faire honneur au bon enfant d’hier.
Mais voila, petit Pierre rencontra un autre Pierre, qui très vite, lui vola son cœur, sans que personne n’en soit responsable, comme ça, comme une évidence.
Le bien et le mal se mirent à tournoyer pour mieux se confondre, le blanc et le noir se marièrent pour offrir un ton inconnu et mystérieux.
Petit Pierre était perdu, il eut peur, il voulu revenir vers le bleu lumineux de son enfance et abandonna l’autre à l’obscurité de l’abandon.
On se perd facilement dans la noirceur de la nuit surtout lorsqu’on sait que l’aurore fuyante baptisera une douloureuse solitude, alors on renonce, on disparait, on part vers un monde sans barrières d’aucune sorte...
Pierre a appris que le bien qu’il pensait salvateur lui dévore le cœur, et que le mal auquel il a voulu se soustraire lui détruit le corps.
Pierre ne se serre plus contre personne pour échapper aux gouttes pluie…