Le dermier jour d'un condamné
J’avais lu le dernier jour d’un condamné encore enfant, et c’est donc avec plus de maturité, du moins je l’espère (sourire) que je l’ai appréhendé.
La peine de mort a été, durant les premières années de ma scolarité, le thème à l’honneur.
A chaque rentrée scolaire nous avions le droit au fameux sujet : que pensez-vous de la peine de mort ?
Nous y allions tous de notre tirade sans vraiment comprendre toute l’étendue de la question.
J’ai pris conscience de toute l’horreur de la chose le matin du 28 novembre 1972 au petit déjeuner, avant de partir pour le collège, un communiqué laconique informait que Buffet et Bontems, avaient été exécutés à l’aube.
Le chocolat ce jour là n’a pas été bu, parce que subitement j’ai compris que la France, que cette France que je voyais comme une mère protectrice comme un pays évolué et civilisé venait de permettre que l’on verse le sang, que l’on tue, que l’on enlève la vie, il m’a fallu vivre ce jour pour que je réalise ce qu’était l’horreur des mots « condamnation à mort ».
Je vous assure qu’en cet instant, un courant glacial a parcouru mes membres, ce n’était plus une idéologie, c’était un carnage ; on avait coupé deux hommes en deux en ayant le culot de dire que c’était au nom de la France, par conséquent des Français.
Combien de Français ont désiré que l’on tronçonne des hommes ?
L’odieux n’est pas réparé par l’odieux.
J’ai du mal à réaliser, encore aujourd’hui, qu’après ma naissance régnait cette sauvagerie sanglante !
Un homme est accusé de crime de sang et on lui répond de la même manière, on répond à la barbarie par la barbarie.
Maitre Badinter a enfin réussi à faire bouger les choses, à faire prendre conscience que la solution n’était pas l’échafaud, 152 ans après le plaidoyer d’Hugo.
Je sais que certains me dirons que si j’avais appartenu aux membres de la famille d’une victime je réagirais autrement, et c’est exact, absolument exact et c’est pourquoi ce sont des tiers qui ont à juger, car la trop grande implication empêche la réflexion sensé sur la suite à donner à des actes criminels.
La seule question qui vaut d’être posée l’a été depuis longtemps par Hugo ; notamment dans Claude Gueux.
Quelles sont les circonstances qui ont amené un homme à se conduire en meurtrier, à le réduire à cet acte terrible ?
Personne ne peut retirer la vie sans se rendre aussi coupable que celui que l’on condamne !